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Vents

Ce matin quand l’appel téléphonique était terminé, je me rendais compte que ce que j’avais entendu m’avait soulagé. Mon père venait enfin de mourir. J’ai saisi mon manteau et mon sac à dos qui contient ce qu’il faut d’affaires pour évoluer au-delà de mes murs, et je suis parti en voiture pour Remich, sur la Moselle luxembourgeoise. J’y ai été prendre un repas dans un restaurant, puis j’ai marché le long de la rivière. J’ai eu plaisir à sentir les vents, ceux-là mêmes qui nous traversent tous, gonfler mes voiles.
J’ai effectué un court aller-retour, environ quatre kilomètres, je suis rentré dans la voiture et j’ai été jusqu’aux rives de la Sûre, plus précisément à Rosport. J’y ai garé la voiture près d’un parc et j’ai cueilli une grande feuille jaune et verte d’une branche d’un platane. Après environ un kilomètre de marche vers l’aval, j’ai rejoint la rivière, car à Rosport, un grand méandre l’éloigne de la route luxembourgeoise. J’ai marché à travers un champ, et, étant descendu sur une berge encore bien sauvage, j’ai posé la feuille dans le cours d’eau, l’observant se faire happer avec douceur. J’ai regardé la feuille s’éloigner en faisant lentement un tour sur elle-même. Alors que je m’étais attendu à la suivre du regard en recueillement jusqu’au moment où le cours d’eau l’aurait emmenée au-delà de ma perception, la feuille n’a finalement jamais été prise en charge par la rivière, restant deux mètres plus loin et à un mètre de la berge, dans les branches d’un arbuste qui retombaient dans l’eau. En traversant le champ pour regagner ma voiture et percevant une fine pluie soufflée par le vent, j’ai souri à tout ça.